Carnet de bord du match Dübendorf – Bâle


Si j’avais écrit ce carnet de bord en rentrant de Dübendorf hier soir, sous le coup de l’émotion, il aurait été probablement différent. Mais ne dit-on pas “la nuit porte conseil”? Donc… C’est à tête reposée que je vous le partage aujourd’hui.

Ma réflexion du jour m’amène à me poser la question suivante: la victoire a-t-elle plus d’importance que l’intégrité des joueurs, des camarades, des anciens coéquipiers?

Que se passe-t-il dans la tête de celui qui envoie un adversaire frapper la bande de la tête, de celui qui assène un coup de canne dans les dents d’un autre? La frustration est-elle à ce point incontrôlable que des joueurs préfèrent la violence au lieu de garder leur énergie pour marquer des goals?

Que pensent ces hockeyeurs à la vue d’un homme à terre, immobile? A celui qui rejoint son banc en criant de douleur, ou au feu bleu de l’ambulance parquée à l’entrée? Une civière qui s’en va?

Toutes ces questions, je me les pose à chaque scène de violence, à chaque check trop appuyé, à ces gestes vengeurs. Je pense à ces parents horrifiés de voir leur enfant inconscient, à ceux qui doivent les accompagner à l’hôpital, à ces conjointes inquiètes, ou pire, à leurs propres enfants, témoins de ce qu’ils ne devraient jamais voir.
Si le hockey est un jeu dur, physique, il reste à mes yeux le plus beau sport du monde. Mais quand la dureté dépasse les limites de la santé, il fait apparaître la pire facette de l’être humain…

J’apprécie les émotions dans le sport, j’aime prendre en photos les bagarres, parce que dans les limites du raisonnable elles mettent un peu d’ambiance pendant le match. Mais hier soir, force est de constater que touchée au plus profond de moi en voyant mes amis subir cette violence, je n’attendais qu’une chose à la fin du premier tiers: rentrer chez moi au plus vite, incapable de continuer plus longtemps à photographier ce match.

Finalement, je suis restée, j’ai continué et je suis allée au bout, de la même manière que l’a fait l’équipe de Dübendorf, jusqu’au coup de sifflet final, récompensée par une victoire plus que méritée !

Cyrill Kreis