Interview de Michael Tscherrig, responsable des arbitres de Suisse romande

source: SIHF
© Mauricette Schnider

L’arbitre, ce drôle de zèbre. Il patine, et plutôt bien, attentif aux règles de jeu. Il voit, il siffle, il sue et reste froid et lucide, même lorsqu’il est mis sous pression par les joueurs, les coachs et les fans… Un acteur du spectacle hockey. Indispensable, c’est l’un des partenaires clé de la SIHF et de la Regio League Romandie, et bien sûr des hockeyeurs : sans lui, pas de jeu ! Entamant sa deuxième année parmi les 7 arbitres professionnels en Suisse, reconnaissable à son numéro 86, le Sierrois Michael Tscherrig officie en National League depuis 2015 et au niveau international depuis 2017. Et il a repris du Biennois Alex Dipietro, en début de saison 2020/21, la responsabilité des arbitres de Suisse romande. On fait le point avec lui sur les besoins et ses objectifs.

Michael Tscherrig, en plus d’être arbitre professionnel, vous avez accepté le défi de diriger l’arbitrage dans les ligues inférieures. Pouvez-vous nous donner une idée de l’ampleur de la tâche?

J’ai repris au pied levé le travail initié l’année dernière par Alex Dipietro, qui continue à officier comme arbitre mais plus en tant que professionnel puisqu’il a repris son travail dans le domaine de la santé à Berne. Je m’attendais bien à une charge importante, mais j’ai bien vite vu que c’était du costaud ! Pour toutes les ligues qui nous concernent, de la 1ère à la 4ème Ligue en passant par les Juniors, il y a environ 2200 matchs à diriger durant une saison: c’est énorme à gérer, et cela n’est possible qu’avec le formidable travail du comité qui m’entoure. Pour réaliser un tel programme, il nous faut environ 320 arbitres. Aujourd’hui, il en manque 20. Je veux y travailler: redonner du sens et de la motivation au sein du corps arbitral. Et mieux communiquer avec les clubs, qui ont la responsabilité de mettre à disposition un certain nombre d’arbitres, autour des synergies qui nous unissent.

Comment allez-vous trouver ces 20 arbitres manquants?

Selon moi, le problème est autant une question de disponibilité des arbitres, de responsabilité des clubs, que de mauvaise image de l’arbitrage. D’un côté, de vrais passionnés de hockey à qui l’on demande d’investir beaucoup de temps sur la glace et en formation; d’un autre des clubs qui ont la responsabilité de déléguer des arbitres pour le sport qu’ils aiment, et puis la mauvaise image d’un manager de jeu dont l’outil de travail est un règlement complexe, et qui est forcément mal compris, parfois. Je comprends que cela puisse influer sur les vocations, sans parler de carrières d’arbitre.

Concrètement?

Mon projet est de travailler à un marketing positif de notre image, pour que tout le monde comprenne l’enjeu qu’il y a à recruter de nouveaux passionnés et à fidéliser les actifs. Je pourrai compter sur la campagne de recrutement de la fédération, «No Refs, No Game», repoussée pour cause de Covid-19 au début de l’année 2021, dans laquelle de jeunes arbitres de chaque région vont promouvoir leur fonction par voie d’affichage, vidéos et messages sur les réseaux. Et j’ai l’appui du nouveau Président de la Regio League, Marc-Anthony Anner, et du Président romand Philippe Raboud, avec lesquels une parfaite collaboration s’est mise en place autour de ce projet.

Mon plan d’action est aussi guidé par le besoin de communication et de transparence. Concrètement, j’ai ouvert un formulaire de contact à disposition des clubs pour un meilleur dialogue, pour réagir à certaines décisions ou événements lors de matchs. Plus qu’ouvrir un cahier de doléances, c’est un moyen de mieux s’écouter et se comprendre, de s’entendre autour de leur position, du règlement de jeu et de son interprétation. Un outil qui semblait nécessaire, car il est souvent utilisé. Mais une meilleure communication commence déjà sur la glace, de la part des arbitres avec les joueurs et les bancs. Je veux mieux les former et les responsabiliser à expliquer sur quel point de règlement leurs décisions sont prises, à dialoguer pour éviter des malentendus sous le coup de la pression ou de l’émotion. Point positif: les arbitres m’appellent ou m’écrivent après des situations qu’ils ont vues à la télé lors de mes matchs et me demandent des explications, commentent, voire me charrient si j’ai fait une erreur, vidéo à l’appui.

Mais que faire pour motiver un jeune arbitre qui voudrait se lancer demain?

A la Regio League Romandie, une structure est mise en place pour former et accompagner les arbitres, pour alimenter cette autre facette de la passion hockey. Car oui, diriger un match est passionnant ! Un nouvel arbitre commencera bien sûr par les ligues inférieures, de la 4ème jusqu’à la 1ère Ligue. Puis les meilleurs sont sélectionnés comme Prospects pour officier en MySports League ou en U20 Elite: régulièrement évalués, après un maximum de 3 ans ils peuvent être promus en National ou en Swiss League, ou maintenus dans les effectifs des ligues inférieures et catégories Juniors. Bien des voies sont possibles, qui permettent à chacun de trouver son compte, de se révéler. Étant passé par toutes ces étapes, j’espère être prêt à accompagner au mieux les candidats dès leurs débuts, puis durant leur progression, et à faire en sorte que leur passion soit gratifiée.


La voix d’un jeune arbitre...

Valentin Wyss, 15 ans, arbitre depuis déjà 3 saisons, la saison dernière jusqu’en U13 Top. Mais la passion du hockey et de l’arbitrage l’habite depuis bien plus longtemps: le jeune Tramelot a sifflé son premier match de vétérans à l’âge de 10 ans! «J’aime le hockey, et j’aime l’arbitrage. Appliquer toutes ces règles est super intéressant, j’apprends plein de choses. Et puis diriger le jeu et les hommes, ça aussi c’est passionnant.» Écolier de 11ème année, Valentin joue aussi comme défenseur en U17 du HC Tramelan. Sa passion de l’arbitrage l’a déjà fait siffler comme linesman d’Alex Dipietro, lors d’un U15 Canada-St-Imier à Saignelégier, et il en témoignera dans une vidéo de la campagne «No Refs, No Game» de la SIHF l’année prochaine. S’il a réussi le cours d’arbitrage base 1 cet été, son rêve et son but désormais, c’est la … National League! «Je vais m’accrocher à ce rêve, je sais que ce sera long pour grimper tous ces échelons, mais je ferai tout pour y arriver.»


Et vu d’un club ?

Martin Scheidegger, Directeur sportif du HC Reconvilier (4ème Ligue), s’enthousiasme devant ces initiatives des chefs de jeu: «Avec Alex Dipietro, on avait affaire à quelqu’un de très professionnel, parfaitement à l’écoute, et je ne doute pas qu’il en sera de même avec Michael Tscherrig. J’ai apprécié à 2-3 reprises la saison passée le temps consacré à nos demandes. Dans les petites ligues, l’arbitrage est moins souvent contrôlé, il peut arriver que sur la glace il n’y ait pas moyen de discuter.» Alors vous avez utilisé ce formulaire? «Oui. C’est un lien direct et rapide. Alex s’était montré très réactif pour pouvoir échanger autour non pas de broutilles, mais d’arguments plus sérieux comme par exemple des problèmes de gestion de l’arbitrage ou des situations d’abus d’autorité. C’est une réelle plus-value.»

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